Fil d'Ariane
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L’alcool est en France, comme dans la quasi-totalité des pays européens, la substance psychoactive la plus consommée.
L'alcool est une substance liquide d’origine naturelle (alcool éthylique) obtenue par fermentation de végétaux riches en sucre ou par distillation. L’alcool entre dans la composition des boissons alcoolisées, qui sont consommées pour leurs effets euphorisants et désinhibants. L'alcool n'est pas digéré : il passe directement du tube digestif aux vaisseaux sanguins. En quelques minutes, le sang le transporte dans toutes les parties de l'organisme.
Sa consommation peut entraîner une forte dépendance psychique et physique avec syndrome de manque en cas de sevrage, pouvant aller jusqu’à des délires hallucinatoires (delirium tremens). Les effets toxiques sont multiples : cirrhose du foie, cancer du foie, maladies cardiovasculaires, cancer des voies aérodigestives supérieures, etc.
Le vin représente 52 % des quantités totales d’alcool pur mises en vente (contre 25 % pour la bière et 21 % pour les spiritueux). Rapportées à la population âgée de 15 ans ou plus, les quantités totales d’alcool pur vendues en 2022 représentent en moyenne l’équivalent de 2,4 verres standards de boissons alcoolisées quotidiens par personne (un verre standard contenant 10 g d’alcool pur).
Par rapport au début des années 1960, la consommation de boissons alcoolisées (en équivalent alcool pur) a été réduite de plus de moitié en France, cette diminution étant essentiellement imputable à la baisse de la consommation de vin.
Les prix relatifs de l’ensemble des boissons alcoolisées sont restés à peu près stables entre 2000 et 2010 mais ont augmenté de 7,5 % entre 2011 et 2019. Ils ont ensuite baissé de 2,6 % entre 2019 et 2022.
L’alcool est la première substance psychoactive expérimentée à l’adolescence. En 2022, quatre collégiens sur dix ont déjà bu au moins une fois une boisson alcoolisée au cours de leur vie (43,4 %). Ce taux d’expérimentation de l’alcool a diminué de 17 points par rapport à 2018 (60,0 %). L’usage récent et l’usage régulier sont demeurés stables, respectivement à 21,9 % et 2,1 %. L’expérimentation de l’ivresse, qui concerne un collégien sur dix, est restée stable également.
L’alcool est également le produit le plus diffusé au lycée, qui constitue un moment d’installation et d’intensification des pratiques. Une diminution sensible des niveaux de consommation s’observe néanmoins entre 2018 et 2022. L’expérimentation de l’alcool et l’usage dans le mois sont passés respectivement de 85,0 % à 68,3 % et de 62,1 % à 49,3 %. La consommation régulière d’alcool a été divisée par trois, passant de 16,7 % à 5,3 %. Par ailleurs, 34,5 % des lycéens ont déclaré une alcoolisation ponctuelle importante (API), qui consiste à boire au moins 5 verres d’alcool en une seule occasion dans le mois précédant l’enquête. Les circonstances de consommation d’alcool sont fortement différenciées selon le milieu social et le genre à l’adolescence.
En 2022, l’Enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la défense (ESCAPAD) portant sur les jeunes de 17 ans, révèle que l’alcool demeure la substance la plus largement expérimentée, même si le recul continu de sa diffusion depuis une décennie se poursuit (80,6 % vs 85,7 % en 2017, 89,3 % en 2014 et 92,6 % en 2008). À 17 ans, les boissons alcoolisées restent ainsi très communément consommées : près de six jeunes sur dix en ont bu au cours du mois écoulé (58,6 % vs 66,5 % et 72,0 % en 2014). Les usages réguliers (10 fois par mois) sont en baisse de plus d’un point (7,2 % au lieu de 8,4 % en 2017).
S’agissant des API, 36,6 % des jeunes déclarent ce comportement au cours du dernier mois en 2022. Ils étaient 44,0 % en 2014. Les API répétées (au moins trois épisodes au cours du mois) ont également diminué (13,6 %, contre 16,4 % en 2017), alors que les API dites « régulières » (au moins dix fois) ne concernent, comme en 2017, qu’une très faible part des adolescents (2,1 %).
Selon le Baromètre de Santé publique France, la part de la population âgée de 18 à 75 ans indiquant avoir bu de l’alcool dans l’année est en légère baisse (passant de 86,5 % en 2017 à 85 % en 2021). Sur l’ensemble de la population de cette tranche d’âge, 8,0 % des personnes interrogées déclarent boire quotidiennement de l’alcool, ce type de consommation se rencontrant presque exclusivement chez les personnes de plus de 50 ans. Quel que soit l’âge, les femmes sont globalement moins nombreuses à consommer et cette différence est d’autant plus affirmée que les fréquences de consommation sont élevées (12,6 % des hommes consomment quotidiennement contre 3,8 % des femmes). En revanche, la part de femmes déclarant avoir eu une API au moins une fois dans l’année et la part de celles déclarant au moins une API par mois sont en hausse significative : passant respectivement de 21,4 % à 23,0 % et de 7,6 % à 8,6 % entre 2017 et 2021.
La consommation de boissons alcoolisées provoque des dommages sanitaires et sociaux. Les dommages sanitaires peuvent être définis comme l’ensemble des maladies et traumatismes provoqués par la consommation d’alcool. L’alcoolisation peut également avoir des répercussions négatives sur la vie sociale (relations avec les proches, emploi, délinquance) des consommateurs et des personnes en contact avec eux, diminuant ainsi leur qualité de vie et entraînant des dommages pour la collectivité.
Les dommages pour la santé liés à la consommation d’alcool dépendent des quantités absorbées, des modalités d’usage, et de nombreux facteurs environnementaux et individuels. Ces risques peuvent apparaître lorsque la consommation est chronique, c'est-à-dire généralement quotidienne, mais aussi lorsqu’elle est ponctuelle.
La consommation chronique d’alcool augmente le risque de survenue d’un nombre important de maladies. Il augmente en général avec la dose d’alcool ingérée (même si le niveau pour lequel le risque de dommages est minimal est de zéro verre standard par semaine).
Outre son rôle dans l’apparition et le développement de maladies du foie et de certains cancers, l’alcool est aussi un neurotoxique, qu’il soit consommé de façon ponctuelle ou chronique. L’apparition de lésions et de maladies (neuropathies périphériques, encéphalopathies, troubles cognitifs) résultant de ce dernier mode de consommation peut être la conséquence de l’alcoolisation mais aussi du sevrage et de leur répétitions (épilepsies de sevrages). La dépendance qui peut s’installer chez une partie des consommateurs d’alcool est une autre manifestation de la toxicité de l’alcool sur le système nerveux central. Par ailleurs, alcool et dépression sont souvent étroitement associés.
Enfin, la consommation d’alcool par une femme enceinte peut provoquer différentes perturbations, variables selon le mode de consommation de la mère, sa sensibilité à l’alcool ainsi que celle du fœtus, allant du trouble léger du comportement de l’enfant à naître jusqu’aux anomalies sévères du développement (syndrome d’alcoolisation fœtale). Les troubles se manifestent principalement au niveau du système nerveux central.
La consommation d’une très forte quantité d’alcool peut provoquer un coma éthylique qui dans certains cas engage le pronostic vital. Le coma éthylique intervient en moyenne pour un adulte pour des doses supérieures à 3 grammes d’alcool pur par litre de sang (la dose mortelle varie suivant les individus et leur accoutumance à l’alcool).
Mais le plus souvent, lors d’une intoxication aiguë, les dommages sont la conséquence de la perte de contrôle de la personne alcoolisée qui peut se traduire par des accidents et des mises en danger immédiates susceptibles de provoquer des traumatismes voire le décès du consommateur ou d'un tiers.
Les derniers chiffres de la mortalité attribuable à l’alcool en France sont ceux de 2015 : 41 000 décès par an, dont 30 000 chez les hommes et 11 000 chez les femmes, soit respectivement 11 % et 4 % de la mortalité des adultes de quinze ans et plus.
La plus grande proportion de cancers causés par l’alcool concerne l’œsophage et le foie. Les cancers du sein, de la cavité orale, de l’oropharynx, de l’hypopharynx et colorectal contribuent le plus aux nouveaux cas de cancers attribuables à l’alcool.
Les personnes en difficulté avec l’alcool peuvent s’adresser à différents types de structures (hôpitaux, médecins de ville, structures médico-sociales spécialisées en addictologie, associations d’entraide). On ne dispose de données pour suivre les évolutions récentes que pour les hôpitaux et les structures médico-sociales, les centres de soins d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA).
Au niveau des hospitalisations, le nombre de séjours suivant les différentes catégories de diagnostics principaux mentionnant l’alcool dans leur intitulé était de 228 000 en 2022, dont 51 % pour dépendance et sevrage, 31 % pour intoxications aiguës, 15 % pour les effets à long terme de l’alcoolisation.
Les CSAPA accueillent quant à eux des personnes ayant des consommations d’alcool excessives, le plus souvent dépendantes (2/3 des patients) ou ayant un usage nocif, ou à risque. On dénombre 389 CSAPA en 2022 pour une file active d’environ 211 000 usagers, dont 37 % l’ont été principalement pour un problème d’alcool (près de la moitié d’entre eux ont été vus pour la première fois en 2022).
En 2022, 759 personnes ont été tuées dans un accident avec alcool, ce qui représente 23 % des personnes tuées dans les accidents avec alcool connu. En extrapolant sur l’ensemble des accidents (y compris ceux où l’alcoolémie est inconnue), l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR) estime que 996 personnes ont été tuées en 2022 dans un accident avec un conducteur alcoolisé, contre 1 052 en 2019. On dénombrait 87 900 condamnations pour conduite en état alcoolique en 2019, hors compositions pénales, procédure qui permet au procureur de proposer une mesure intermédiaire entre la poursuite et le classement sans suite.
Selon l’Enquête sur les représentations, opinions et perceptions sur les psychotropes (EROPP), l’alcool est rarement perçu comme une « drogue ». À l’inverse des produits illicites, seule une minorité d’enquêtés (10 %) le perçoit comme dangereux dès la première consommation. C’est principalement l’usage quotidien qui est cité comme dangereux, par 79 % des répondants. Pour 56 % des enquêtés, offrir ou boire de l’alcool fait partie des règles du savoir-vivre. Plus d’un tiers (36 %) n’ont jamais remarqué la présence sur les bouteilles d’alcool d’un logo avertissant des dangers de l’alcool pour les femmes enceintes. Près d’un quart (23 %) des répondants se souviennent avoir vu ou entendu une publicité pour une boisson alcoolisée au cours de la dernière semaine. Enfin, une quasi-majorité de la population (45 %) considère qu’il est acceptable de boire son premier verre d’alcool avant 18 ans.
Pour des raisons fiscales et d'ordre public, le commerce et la distribution d'alcool sont réglementés depuis plusieurs siècles. Les préoccupations de santé publique du législateur se sont traduites par l’instauration d’un cadre juridique relativement récent (ordonnances de 1960 sur la lutte contre l’alcoolisme, loi Évin du 10 janvier 1991, loi portant réforme de l’hôpital, relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) adoptée le 21 juillet 2009) qui fait régulièrement l’objet de remises en cause. Le débat public oppose en effet le discours des spécialistes en alcoologie et addictologie aux revendications des viticulteurs, producteurs et distributeurs, opérateurs économiques, et il partage également l'opinion publique.